1914. Il y a vingt ans, un 10 juillet, le premier souffle. C'est toujours par là qu'on commence, n'est-ce pas?
Monsieur et Madame Deetz ont tout des parents exemplaires. Emily naît au sud-est de Londres, quelque part où la Manche n'est pas si loin des terres de France. Malheureusement, dans ces beaux pays de l'autre côté de l'eau, c'est la guerre qui se déclare la même année. Les Deetz ne veulent pas vraiment prendre part à ces débats et à ces bombardements; bien sûr, alors, ils ont la chance de se trouver du bon côté de la palissade, dirons-nous, ce qui rend leur choix plus aisé. Ils sont considérés comme les alliés, et leur pays sera victorieux.
Mais ces deux drôles d'oiseaux préféraient ne pas se soucier de ces problèmes trop grands pour eux. Ils ne se sont jamais posé de questions trop grandes pour eux. Ils étaient revenus à Londres après un long moment passé en indonésie. Elle, aimait entendre des langues différentes et apprendre à se faire comprendre, à communiquer malgré cette barrière. Lui aimait voir le monde à travers ses aquarelles, mais il avait besoin de paysages pour cela. Aussi, il était vétérinaire, et n'avait pas trop de mal à trouver du travail ailleurs, où il approchait de tout nouveaux animaux auprès des professionnels natifs.
Après quelques années, une fois la guerre achevée, et avoir prit le temps d'initier leur Emily aux simplicités de la vie malgré l'ambiance étouffante, ils décidèrent de reprendre le large.

1920. L'Ecosse. Son humidité ambiante, sa pluie et son soleil voilé. Mme Deetz apprend la lecture et l'écriture, pas à pas, à sa petite brune. Monsieur, lui, trempe ses pinceaux dans le ciel gris et les yeux tendres de sa fille.
Emily n'est pas bavarde, n'est pas braillarde, est un peu capricieuse mais comprend les limites du possible. Elle a soif d'apprendre, pose des questions, parle déjà aisément l'anglais.
1924. Ils traversent enfin cette eau pour la Norvège, l'histoire de quelques années, puis la Suède, et ces pays qui contournent l'Allemagne jusqu'en Italie. Ces accents, ces langages, elle en retient des bribes et des mots. Elle rencontre des gens, mais s'attend au prochain départ. Elle reste en retrait, dans son silence contemplatif, déjà.


1927, c'est l'aube de l'adolescence, et un départ pour la France, où, cette fois, ils comptent rester un peu plus longtemps. Son centre, ses ruisseaux, ses champs jaunes du Sud, cette langue complexe qu'elle a envie de connaître, qu'une jeune fille lui parle chaque jour. C'est sûrement la première amie qu'elle dénote, et dont elle se souviendra. Elle a les cheveux d'un blond orangé, et des tâches de rousseur qu'elle envie. Elle est jolie et va très bien avec son soleil frais. Emily lui parle de l'Angleterre, elles se comprennent assez bien malgré ces barrières de voix. Et puis, sa rouquine, elle, fait de la jonglerie dans un cirque. Du mime, aussi. Elle apprend, et c'est ce qu'elle deviendra, elle en est sûre. La noiraude jauge l'idée avec un oeil sceptique; le cirque? Vraiment?


1931 est le début d'autre chose. Emily a 17 ans, et elle doit quitter ce pays qu'elle a apprit à appeler chez elle. Ses parents veulent voir l'Afrique du Sud. C'est en colère qu'elle les suit, n'ayant pas l'âge de s'enfuir sans leur accord.
Là-bas, alors, seule à nouveau, le regard vide et le sourire froid, elle passe son temps au cirque local; pas si proche, puisqu'elle y va à pied et s'y use les chaussures. Elle n'aime pas la chaleur ambiante, n'y est pas habituée, et sa peau rougit souvent, même en se promenant sous une ombrelle. Les jeunes femmes se regrettent, s'envoient des lettres, continuent à se raconter des choses et d'autres, mais se manquent beaucoup. Ces dernières années ont été celles où elles ont le plus grandit, à l'intérieur, et il leur semble que personne d'autre ne pourra
comprendre une telle chose.
Emily aime déjà piquer une cigarette à son père de temps en temps, en cachette, bien à l'abri. Les quelques codes qui s'appliquent aux femmes la font grimacer, d'ailleurs. Mais elle semble s'y plier, sous les regards publics, non sans un air las et maussade.
Sous le chapiteau, bien que l'acrobatie et les balles lui rappellent sa compagne, elle se prend d'une fascination étrange pour un dompteur et ses bêtes; de grands tigres roux et noirs, puissants et pourtant dociles sous le fouet qui claque contre le sol.

C'est au moment, sans doute, où elle se met à penser à entrer dans un cirque, que Maître Todd lui apparaît. Que faisait-il là? C'est une question qui n'a pas encore trouvé de réponse. Il semble connaître ce dit dompteur, et la couve avec bienveillance après les spectacles; c'est grâce à lui qu'elle apprend les coulisses du métier et qu'elle vient à échanger avec cet homme au fouet, et vient même à le lui faire lâcher. L'aspect violent fut peu à peu effacé par la jeune femme, qui ne travaillait qu'au regard et au geste. Un vrai talent qui de jour en jour grandit, jusqu'au moment où le Maître lui proposa un contrat, accompagné d'un lion blanc déjà presque adulte.
Sa reconnaissance envers cet homme est trop grande pour la décrire, et, probablement, ne le lui a-t-elle jamais vraiment formulé. Sa rencontre avec sa bête l'a sauvée de l'état dépressif dans lequel elle s'enlisait avant qu'il n'arrive. Son avenir se traçait alors qu'elle n'y avait jamais songé. Monsieur et Madame rencontrèrent le Maître, et ils rentrèrent de concert, ne pouvant se résoudre à laisser leur petite aux mains d'un inconnu, bien qu'expert.


Voilà un an, alors, qu'Emily travaille au cirque en tant que dompteuse. Le gros chat apprivoisé qui l'accompagne n'est pas en cage avec ses camarades félins, mais traîne autour de la caravane, et parfois l'accompagne dans ses balades, mais ne sort jamais du cirque. Il est incroyablement docile, et semble presque d'intelligence humaine. Même si les débuts ont été mouvementés, la noiraude a réussit à en faire un animal stable, et domestiqué non pas au claquement du fouet sur les flancs, mais à la confiance des regards et à l'écoute animale. Le secret de ce fonctionnement n'est pas une relation de maître à animal, mais de bête à bête. Emily le considère avec respect, et c'est pourquoi, sans doute, il ne lui crée pas de problème de même.
Son pelage blanc étonne, son attitude si calme aussi, et lors des numéros, c'est une harmonie charmante qu'ils dégagent, une leçon, aussi, sans doute. Emily est fière d'exhiber ce lien unique qu'elle partage avec lui. Joshua est sa compagnie la plus fidèle, malgré les lettres de ses proches qui continuent à arriver. Il est sa garde personnelle et l'instinct animal qu'elle n'a pas. Il est aussi son identité, ici, tout en contraste. La plupart connaissent le nom de l'animal et l'associent sans peine à son nom de scène. Il est rare, maintenant, de les croiser l'un sans l'autre, et donc rarissime que la brune quitte l'enceinte du cirque.

Comment veux-tu qu'on t'appelle? : Emily. Non?
Tu as quel âge? : 18 ans.
Tu habites dans quel coin de la planète? : En France vers le Sud à Toulouse. Et j'habite un peu en banlieue parisienne aussi (chez mes parents.)
Qu'est-ce qui te passionne? : Ouah. Euh. Le dessin, l'écriture et la poésie. J'aime bien les dragons et la musique, j'aime les voix qui grincent et les ciels d'automne, danser la valse, Mina, envoyer des lettres, envoyer des lettres à Mina, j'aime manger, j'aime boire, j'aime fumer. Je crois que je suis passionnée de vivre, et que ça fait presque peur.
Un mot pour te décrire serait... : Dodeliner
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Comment as-tu connu The Dark Circus? : Peter. Ziggy. Jsais pas trop encore.

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Winona Ryder : Emily Sheren Deetz [i]alias[/i] La Noiraude