Comment veux-tu qu'on t'appelle? : Mina (c'est mon vrai prénom dans la vraie vie véritable au sein des véritables gens et je l'aime assez bien pour qu'on m'appelle comme ça. Si je ne répond pas, essayez, "Ô sublime Mina", ça marche y paraît)
Tu as quel âge? : 18 ans
Tu habites dans quel coin de la planète? : Dans le ch'nord de la France (autrefois en Ecosse)
Qu'est-ce qui te passionne? : Le cinéma, le théâtre, la littérature, la musique (le métal), les bonshommes avec des barbes, les questions existentielles telles que "Quelle partie d'un bébé coupé en deux meurt en premier ?"
Un mot pour te décrire serait... : Cellophane
Un Smiley qui te représente...:   
Le code de validation est...: ► Validé par Hyacinthe
Comment as-tu connu The Dark Circus? : Le hasard ou bien le karma, ça dépend.

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Nicolas Duvauchelle : Peter Davies [i]alias[/i] Ziggy

Valse Sentimentale - Tchaikovsky

Les pupilles du garçons pleuraient des larmes. Tout était flou, tout était parti. Les gens étaient partis. Il était seul. Monsieur Barrie s'accroupit devant lui. Il lui enfila ses mitaines, puis lui boutonna son blouson. Tout en silence, il prit la main de Peter, et le tira lentement pour partir. Mais Peter ne voulait pas partir. Il regardait la tombe de sa maman comme si on y avait enterré son cœur. Son nouveau tuteur le traîna douloureusement hors du cimetière. Ce n'était pas la première fois que Peter venait ici. Il était venu quelques années plus tôt pour y enterrer son père. Maintenant il était seul. Seul avec monsieur Barrie.  « Bon anniversaire, Peter. » murmura maladroitement le vieil homme. Peter lâcha un petit soupir. surpris C'était son anniversaire aujourd'hui. On avait enterré maman, et maintenant il avait huit ans. Pouvait-on donc vraiment grandir sans sa maman ? Comptait-on encore les âges, ou aurait-il toujours huit ans désormais ?

Il dormait peu. Il partageait sa chambre sous les décombres d'un toit avec monsieur Barrie. En inclinant la tête, il pouvait voir les étoiles à travers les trous de toitures. Londres à cette époque possédait en son ciel des étoiles. Elles ne semblaient danser que pour lui, joli Peter. Et sous les ronflements de monsieur Barrie, le gamin leur racontait des histoires. Comment ils vivaient, ils vendaient des fleurs, monsieur Barrie avait un chariot et ils se promenaient, et ils criaient, Achetez mes fleurs mesdames messieurs, mes jolies fleurs de campagne ! Il leur racontait combien ils en avaient vendus, combien ils en jetaient tous les soirs, comment ils faisaient pour les piquer aux jardins publics... Il racontait tout aux étoiles. Même ce qu'il n'avait pas fait. Ce qu'il aurait voulu faire. Avoir un singe, jouer de l'accordéon, gagner de l'argent sans voler à monsieur le roi d'Angleterre. Et ce que lui disait monsieur Barrie, que le roi ne voulait pas voir ses sujets mourir avant tout, que les fleurs sont bien mieux dans les mains de damoiselles plutôt qu'à s'ennuyer par terre.

Le jour de son anniversaire, Peter ne parlait plus. Il perdait la parole, il ne disait plus rien. Il ne voulait pas compter, il ne pouvait plus compter sans sa maman. La seule chose qu'il faisait encore, était de caresser un piano des phalanges. Ça, il faisait. Il aimait encore la musique. Monsieur barrie l'emmenait voir la tombe de ses parents tous les ans, le jour de son anniversaire. Il pensait qu'y allait trop souvent ferait plus de mal à Peter que de bien. Et Peter posait son oreille contre la pierre tombale de sa maman et attendait. Attendait que le morceau de granite lui murmure à l'oreille, que sa maman va bien, qu'elle est au ciel, qu'elle est l'ange le plus magnifique de tous, qu'elle prend soin des petits enfants du ciel mais qu'elle ne l'a pas oublié. Elle lui souhaite un très joyeux anniversaire.
Sur la tombe, il n'était pas écrit « maman ». Mais Peter ne savait pas lire, Peter ne saurait jamais lire. Monsieur Barrie ne pouvait pas lui apprendre. Monsieur Barrie aimait ce gosse et c'est la seule chose qu'il pouvait lui donner. Son amour entier d'homme qui ne fut jamais père.


« APPROCHEZ, VENEZ VOIR LE GRAND ZIGGY ! » criait un grand hurluberlu. L'adolescent se cacha dans la foule. Un grand homme cassé en deux au niveau des hanches gesticulait dans tous les sens. Il avait un grand haut de forme, une queue de pille et tout le charisme du monde sur ses épaules. Une petite fille tournait une manivelle prêt de lui, une manivelle à musique. Elle criait pendant que le grand roux faisaient des moulinets de la main en tenant une baguette. Peter regarda la petite fille. Elle devait avoir cinq ans de moins que lui, pas plus de dix ans, et elle avait l'air beaucoup plus confiante. Il y avait un peu de jalousie dans le regard de Peter. Un peu d'admiration, aussi. Mais son attention se porta sur le magicien.
Ce fut le spectacle de rue le plus incroyable auquel Peter n'avait jamais assisté.
La foule applaudissait, puis s'éparpillait, la petite fille ramassait des tas de piécettes, plus que Peter n'aurait jamais avec ses maudites fleurs. L'étourdissement fut court. Monsieur Barrie vint lui pincer les oreilles. « T'étais où, toi, gamin ? Je t'ai demandé de vendre mes fleurs, pas de les promener ! » Et Peter baissait les yeux sur le panier. Quel panier ? La panique parcouru l'échine de l'adolescent, on lui avait volé le panier de fleur. Déjà monsieur Barrie fronçait les sourcils. Mais une voix interrompu la colère imminente. « Vous avez perdu quelque chose, petit monsieur ? »
La grosse voix de Ziggy s'approcha des deux hommes. Le magicien se pencha sur Peter et son très long bras se déroula. Il ouvra son poing devant l'adolescent. Il y avait de l'argent. « Tenez. Je vous achète les fleurs. »
Monsieur Barrie grogna. « Le morveux se les ai fait voler. »
« Ca ne fait rien. Moi j'aime mieux les fleurs qui ne prennent pas de place. »
« Merci monsieur. » chuchota Peter.
« J'aime rendre les gens heureux garçon. Pas toi ? »
La petite fille d'une dizaine d'année vint tirer la chemise du magicien. Ils s'en allèrent. Et laissèrent des traces de rêves dans la tête d'un orphelin. Il commença à rêver de magie, de lapin qui sortent de chapeaux, de pancartes. Il oubliait de parler aux étoiles le soir, trop prit par la seule pensée de devenir magicien, le magicien qui faisait apparaître le bonheur des gens. Il s’entraînait devant monsieur Barrie qui tristement, admettait qu'il n'avait aucun talent. Mais ça ne faisait rien.

Le cancer qui prit sa mère, prit monsieur Barrie. Tôt ou tard, il devait mourir, ce vieux monsieur. Au chevet, Peter. Ses joues creuses d'adulte souriaient au vide. Le corps inerte du vieux bonhomme sentait le déjà-vu. La mort était banale aux yeux de Peter. Le banal faisait mal aux tripes. 20 ans, et il ne savait pas lire, il ne savait pas vivre, il ne savait pas vendre des fleurs. Il savait seulement faire des tours de magies.

Il avait un sac. C'est tout. Un sac aussi maigrichon et aussi raplati que lui. Il avait un côté dépitant, et sous ses traits de joli garçon, on voyait trop le rêveur qui le tuait. Il n'avançait pas, il rampait les rues. Et une par une, ses fleurs dans son joli chariot fanaient. Il était seul. Il n'ouvrait plus la bouche. Et puis... Et puis...
La réalité a surpris le rêve.
Un cirque en ville.
Des clochettes, des bruits, des magiciens et des dompteurs, des spectacles et des monstres... Tout sortait du brouillard, de l'ambiance glauque que Peter poétisait du regard.



Pour l'instant, passer le balai lui suffirait, disait-il. Comment s'appelait-il lui demanda-t-on. Ziggy, répondit-il. Son nom de scène sans scène, son futur lui-même. L’illettré signa le contrat d'un Z calligraphié.
Les jours passèrent et les mois. Peter parlait peu, ne réclamait rien, aidait dès qu'il pouvait. Il était invisible, il était une catastrophe ambulante, la tête volait sur un nuage pendant que le corps brisait des verres, oubliait de fermer les cages à animaux... Il se faisait tout petit et dans son temps libre, admirait les artistes. Personne ne connaissait son vrai nom, on l'appelait par Ziggy, et Ziggy seulement. Ceux qui l'appréciait l’appelaient Zig, ou l'incapable.  Il avait 25 ans, et il n'avait toujours pas grandit dans sa tête. Mais il n'avait pas besoin de maturité, parce qu'il était heureux autant qu'il était fou.